COURS D'HISTOIRE DE LA SOCIÉTÉ DE MARIE
Auteur :
Jean Coste S.M.
NEUVIÈME
CONFÉRENCE
LE COLLÈGE
DE BELLEY
1829-1836
Principaux documents à consulter:
OM 1, docc. 180; 189-194; 233, § 5; 236; 240; 257. OM 2, docc. 465; 476; 489; 490; 500; 505; 507; 523; 612; 698 ; 699 ; 707 ; 724 ; 742 ; 746, §§ 12-17. OM 3, doc. 819, §§ 72-76.
Ant. textus, fasc. 1, pp. 25-40.
Ecrits de s. Pierre Chanel, docc. 2; 7-11; 14-15.
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CADRE GÉNÉRAL
1. Le collège avant 1829.
Fondé en 1751, tenu successivement par les Antonins et les Joséphistes, fermé durant la révolution, le collège de Belley fut repris à la Toussaint 1803 par les Pères de la Foi (cf. OM 1, p. 179), qui en gardèrent la direction jusqu'en 1808. C'est durant cette période qu'y étudia, de 1803 à 1807, Alphonse de Lamartine, le célèbre poète et homme politique français dont le collège porte aujourd'hui le nom. De 1808 à 1823, le collège, devenu communal, déclina sans cesse et allait être fermé quand survint Mgr Devie.
Ce dernier obtint que le collège fût cédé au diocèse comme petit séminaire. Mais il conserva comme supérieur l'abbé Guigard, qui dirigeait la maison depuis 1819, et on continua couramment à parler du « collège ». Pratiquement, l'établissement garda un caractère mixte, à la fois collège et séminaire. Le recrutement en était assez hétérogène, tous les élèves n'ayant pas la vocation ecclésiastique; la maison recevait des externes de la ville et les élèves d'une école cléricale de la cathédrale, sans compter les élèves du petit séminaire de Meximieux, qui venaient faire leur dernière année à Belley (cf. doc. 180 et JEANTIN, t. 1, p. 151). A l'automne 1826, M. Pichat prit la direction de la maison, qui garda le même caractère.
2. Situation particulière des Maristes de 1829 à 1836.
De 1825 à 1829, les deux abbés Colin avec MM. Déclas et Jallon avaient logé comme missionnaires au dernier étage du collège et avaient été, à ce titre, en butte à l'ho'stilité et aux railleries des professeurs. A l'automne 1827, Pierre Colin avait été nommé directeur spirituel.
Le jour de Pâques, 19 avril 1829, Mgr Devie nomma, malgré ses protestations, Jean-Claude Colin supérieur du collège (cf. docc. 500; 698; 724). Cette nomination fut fortement critiquée (cf. doc. 505) et ne dut guère plaire à ceux qui avaient fait du missionnaire et de ses confrères l'objet de leurs moqueries (cf. docc. 507, § 1; 535, § 31 ). Tant du côté du vicaire général chargé des petits séminaires, M. Ruivet (cf. docc. 535, § 25, et 752, § 24), que du côté du clergé de la cathédrale (cf. doc. 671 ), l'abbé Colin rencontrera de l'opposition.
La nomination de Jean-Claude Colin comme supérieur n'entraînait pas de soi que la maison fût confiée aux aspirants maristes du diocèse, que Mgr Devie avait reconnus comme groupe missionnaire mais nullement comme congrégation religieuse. En fait, il semble que dès le départ l'abbé Colin ait fait admettre en principe que la maison serait tenue autant que possible par ses confrères (cf. doc. 748, § 15). Il cherchera ainsi à regrouper au collège les aspirants à la Société, mais la coexistence de ces derniers avec les autres professeurs allait être une source permanente de difficultés.
Autre situation exceptionnelle : en plus de la responsabilité du collège, Jean-Claude Colin portait celle de toute la Société en projet, surtout après son élection comme supérieur central en 1830. Aussi bien ne put-il garder longtemps le supériorat effectif de la maison. Tout en gardant le titre de supérieur, il dut laisser la direction du collège à des vice-supérieurs, qui furent de 1831 à 1834 Pierre Convers et de 1834 à 1836 Pierre Chanel.
3. Climat politique.
On a dit, à propos des missions, un mot de l'union du trône et de l'autel qui caractérisa les débuts de la restauration en France. Mais à côté des « ultras » qui tenaient pour cette union, il existait en France un fort courant libéral. Sous la pression de ce dernier furent portées, en juin 1828, deux ordonnances royales qui réglementaient le nombre des petits séminaires, interdisaient qu'ils fussent confiés à des religieux et exigeaient l'agrément du roi pour la nomination du personnel directeur (cf. OM 1, pp. 427-429). Nommé supérieur du petit séminaire de Belley quelques mois après ces ordonnances, l'abbé Colin dut voir sa nomination agréée par le roi et commença ainsi son supériorat dans un climat de lutte entre l'épiscopat et le pouvoir civil (cf. docc. 1.92-193 et 742).
En juillet 1830, l'opposition libérale rcnversa le trône de Charles X et instaura en France une monarchie constitutionnelle confìée à Louis-Philippe d'Orléans, dont le règne, connu sous le nom de « monarchie de juillet », durera jusqu'en février 1848. Une vague d'anticléricalisme succéda en France à cette révolution et rendit très difficile la position du clergé durant l'année 1831 (cf. OM 1, pp. 481-482). Les contrecoups s'en firent sentir fortement au collège de Belley (cf. infra).
Au même moment, pour désolidariser le catholicisme dc la monarchie absolutiste, Lamennais fondait avec Lacordaire et Montalembcrt le journal L'Avenir, qui tendait à identifìer la cause de l'Eglise avec celle de la liberté. La condamnation de ce libéralisme catholique par l'encyclique Mirari vos du 15 août 1832 marqua la fìn de L'Avenir, suivie peu après de la défection de Lamennais. L'abbé Colin dut s'opposer fortement, dès avant leur condamnation, aux doctrines menaisiennes répandues parmi les professeurs du collège.
Ainsi donc la situation dans laquelle se trouvait notre fondateur au début de son supériorat au collège était-elle extrêmement complexe et délicate. Reste à voir comment il sut s'y comporter tant à l'égard des maîtres qu'à l'égard des élèves et s'assurer une difficile mais indéniable réussite.
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ATTITUDE ENVERS LE PERSONNEL DU COLLÈGE
1. Premiers contacts.
Dans les premiers mois de son supériorat, l'abbé Colin sut s'imposer en refusant tous les projets de changements qu'on lui soumettait et en s'en tenant à la manière de faire de son prédécesseur (cf. doc. 489). Puis un peu plus tard dans la même année scolaire 1829, sans doute à la rentrée scolaire de l'automne, il exposa ses vues sur la marche de la maison dans un écrit remarquable qui fut sans doute communiqué aux membres du corps professoral dans une série de conférences.
L'autographe de ce texte, l'un des plus anciens, des plus longs et des plus précicux qui soient sortis de la plume du P. Colin, a été heureusement conservé et édité dans les Antiquiores textus, fasc. 1, pp. 25-40. Outre des principes généraux de pédagogie sur lesquels on reviendra, il contient à l'usage des professeurs - prêtres séculiers ou séminaristes encore tous étrangers, cette année-là, au projet de Société de Marie à l'exception des deux abbés Colin - un ensemble de règles à la fois prudentes et fermes. Sans chercher à faire du corps professoral une communauté religieuse, le nouveau supérieur entend demander à tous ce sérieux sacerdotal, ce minimum de vie commune, de prière et de souci apostolique indispensable à des ecclésiastiques adonnés à une même tâche éducatrice. On lira particulièrement les nn. 5-15, 84-95, 109-110, s'attachant à la fois à ce qui est demandé à ces prêtres séculiers et à la manière mesurée et délicate avec laquelle cela leur est proposé. L'absence d'ordres péremptoires et de défenses absolues ainsi que l'usage constant du nous révèlent notamment chez l'abbé Colin le souci de gagner la conviction de ses collaborateurs plus que d'user de l'argument d'autorité.
2. Difficultés.
Malgré cette prudence et cette modération du nouveau supérieur, il était inévitable qu'un bon nombre des anciens professeurs refusât d'entrer dans ses vues et contrecarrât son action. Sans doute parmi les professeurs qui ne revinrent pas aux rentrées de 1829 et 1830, quelques-uns avaient-ils été priés de ne pas se représenter (cf. doc. 507).
Durant l'année scolaire 1830-31, la totalité du corps professoral moins les deux abbés Colin et le préfet des études adhéra avec enthousiasme aux doctrines de Lamennais et alla jusqu'à faire paraître une déclaration dans L'Avenir malgré Mgr Devie, qui en fut fort mécontent (cf. docc. 612; 476, c; 535, § 31 ).
L'abbé Colin songea alors à ne garder dans la maison que des professeurs adhérant au projet de Société de Marie (cf. doc. 233, § 5). Effectivement, sept professeurs ne revinrent pas à la rentrée de novembre 1831. Les sept nouveaux qui les remplacèrent (dont Pierre Chanel) avaient tous participé à la retraite de septembre 1831 et signé la consécration finale (cf. doc. 236). Un des anciens qui restaient en avait fait autant et le corps professoral en entier signa, le 8 décembre 1831, une consécration impliquant un réel engagement vis-à-vis de la Société (cf. doc. 240).
En réalité, cette unanimité était plus extérieure que profonde et n'était pas sans susciter du mécontentement. Parlant d'un jeune homme désireux d'entrer au séminaire, un prêtre de Belley écrivait le 24 septembre 1831: « Dans le temps il pourra faire un bon Mariste pour aller enseigner les mathématiques; dès à présent, il paraît que ce sera une condition nécessaire pour entrer dans l'enseignement. Ce train doit commencer à la Toussaint cette année ». Des treize membres du corps professoral qui avaient signé le 8 décembre 1831, six seulement deviendront maristes, un mourra avant 1836, et les six autres abandonneront le projet (cf. doc. 752, § 22).
A la rentrée de 1832, deux professeurs seulement changèrent, mais il semble que l'abbé Colin ait en vain demandé le départ d'un plus grand nombre (cf. doc. 547, § 24). A la rentrée suivante, M. Convers, vice-supérieur, réussit à obtenir que six ne reviennent pas (cf. docc. 295, § 1; 547, § 24; 746, § 16). D'autres changements eurent lieu en 1834 et 1835 sans qu'on sache s'ils furent exigés par l'abbé Colin ou ses vice-supérieurs.
En définitive, les difficultés avec le personnel séculier du petit séminaire durèrent jusqu'en 1836, date à laquelle les Maristes se retirèrent de la maison à l'exception du P. Bourdin. Mais la Société, comme on le verra en son temps, devra en reprendre la direction deux ans plus tard et la gardera jusqu'en 1845.
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ATTITUDE ENVERS LES ÉLÈVES
1. Premiers contacts.
Nommé supérieur le jour de Pâques, 19 avril 1829, l'abbé Colin dut prendre possession le lendemain. Il le fit par un discours aux enfants préparé à la hâte (cf. doc. 466, § 8) et dont le texte nous est conservé (cf. doc. 190). La finale de ce texte définit le programme du nouveau supérieur : maintenir la paix et le bon ordre. On sera attentif aux corrections apportées dans la seconde rédaction; elles manifestent un souci évident de ne blesser personne tout en laissant entendre clairement que l'on se propose d'être ferme.
Jusqu'à la fin de l'année scolaire, la conduite des élèves fut assez bonne. Six ou sept seulement furent expulsés. Mais avant les vacances, ceux qui n'étaient pas disposés à suivre le règlement furent invités à ne pas revenir. Une quarantaine effectivement ne revinrent pas (cf. doc. 746, § 13).
2. Principes généraux de pédagogie.
Les principes pédagogiques de l'abbé Colin au début de son supériorat sont contenus dans les remarquables Avis aux maîtres de 1829, dont il a déjà été question plus haut. Avant de les écrire, le nouveau supérieur a relu le Traité des études de Rollin, le grand classique de l'éducation en France au XVIIIe siècle, et certains emprunts témoignent qu'il avait l'ouvrage sur sa table en rédigeant son texte. Mais ces Avis sont tout autre chose que le plagiat d'un ouvrage de portée générale. Ils fourmillent de détails adaptés à la situation particulière du collège et témoignent à la fois d'un sens de l'observation concrète et d'une largeur de vues éducatrices devant laquelle on reste confondu quand on pense que l'abbé Colin, vicaire puis missionnaire, avait vécu jusque là en dehors de toute maison d'éducation et n'avait pas été préparé à cette tâche. Peu de textes donnent une telle idée de l'intelligence du P. Colin, de sa faculté d'adaptation et de son sens inné du gouvernement.
A la pédagogie chrétienne l'abbé Colin assigne dès le début de son texte trois objets qu'il emprunte à Rollin mais en en renversant l'ordre. Le Traité des études énumérait : la science, les moeurs, la religion; les Avis aux maîtres (nn. 2-4) demandent que l'on forme des chrétiens, des hommes honnêtes, des savants. Ce primat donné à la formation religieuse est significatif. Avant de revenir plus bas sur ce point essentiel, il faut dire ici un mot des deux autres.
Pour ce qui est de l'instruction littéraire et scientifique, ni l'abbé Colin ni ses collaborateurs ne semblent avoir innové et on sait peu de choses sur les programmes et techniques qu'ils suivirent. Une indication générale sur les matières enseignées est donnée par le doc. 180 et, pour les grandes classes, par les affiches d' : « Exercices publics » de fin d'année qui ornent encore le couloir principal de l'institution Lamartine et où se trouve indiqué l'objet des thèses défendues par les élèves. On peut noter cependant comme un signe de l'intérêt effectif porté par l'abbé Colin à l'instruction profane son souci de maintenir, malgré les oppositions, une classe terminale de mathématiques (cf. doc. 547, § 23).
Quant au travail éducatif, aux rapports entre maîtres et élèves, les principes en sont exposés aux nn. 16-30 des Avis aux maîtres et appliqués, aux nn. 31-83, aux différentes catégories de maîtres et aux cas particuliers. On y trouve le souci d'une autorité ferme et indiscutée, mais avec un souci réel de l'enfant, une bonté et un respect très marqués où se retrouve sans doute la marque du P. Colin. Quelques traits sur la manière de faire de ce dernier à cette époque sont édités en JEANTIN, t. 1, pp. 165-166, et t. 4, pp. 271-276. Ils confirment cette note de bonté, d'indulgence compréhensive, et témoignent d'une excellente connaissance de l'âme enfantine.
3. La crise de 1831.
L'année 1829-30 fut relativement bonne (cf. doc. 746, § 14) mais l'année 1830-31, qui suivit la révolution de juillet, vit régner une exceptionnelle effervescence parmi les élèves. On peut lire à ce sujet les détails rapportés par le P. Mayet (cf. doc. 476 et ses additions, ainsi que doc. 699). Il semble que la maison ait été, durant la plus grande partie de l'année, en état de révolte plus ou moins ouverte, l'indiscipline des élèves trouvant des appuis dans l'attitude libérale d'une partie du corps professoral.
Conséquence de l'indiscipline, l'immoralité fut beaucoup plus forte cette année-là (cf. docc. 476 et 746, § 5). Pour essayer d'y remédier, l'abbé Colin s'imposa des veillées au dortoir et des rondes nocturnes qui portèrent un coup sérieux à sa santé (cf. docc. 476, § 2; 490; 535, § 31).
Ayant réussi, grâce à sa prudence et à sa fermeté, à tenir jusqu'à la fin de l'année scolaire, le supérieur prit pour l'année suivante un certain nombre de mesures énergiques: entre cinquante et soixante-dix élèves ne revinrent pas; un vice-supérieur fut nommé, en l'espèce M. Convers, et, pour maintenir plus facilement la discipline, les élèves furent répartis en trois « divisions » ayant chacune son étude, son dortoir et des promenades séparées, système cher à la pédagogie jésuite et encore utilisé dans la majorité des collèges français actuels (cf. doc. 746, § 16). La mesure ne semble pas avoir été très populaire et on taxa une fois de plus les Maristes de jésuitisme.
4. La lutte contre le péché.
Cette crise heureusement surmontée avait permis de révéler l'énergie spirituelle de l'abbé Colin et l'avait amené à résumer une fois son programme spirituel en cette phrase vigoureuse : « Messieurs, Dieu m'a placé ici pour résister au péché et tant qu'il me restera une goutte de sang dans les veines, j'y résisterai » (cf. doc. 476, § 2).
Pour comprendre cette insistance sur la lutte contre le péché, il faut se souvenir que l'abbé Colin abordait le supériorat du collège non en vétéran de l'éducation mais en ancien missionnaire. Il y apportait cette hantise du mal à combattre, à prévenir et à réparer qui l'animait en chaire et au confessionnal dans ses missions du Bugey. Telle ou telle manière de faire particulièrement directe et percutante rappelle même de près telle formule utilisée durant les missions, en l'espèce l'invitation aux auditeurs à prier pour les membres du groupe qui se trouvent en état de péché (comparez docc. 581, § 17, et 587, § 7, avec JEANTIN, t. I , pp. 162-163 ).
De son expérience de missionnaire l'abbé Colin tenait aussi cette science du confessionnal qui fut une de ses armes pédagogiques les meilleures. A l'époque, le droit canon n'interdisait pas encore aux supérieurs de confesser habituellement leurs élèves, et il devint vite, grâce à sa compréhension des problèmes des enfants, le confesseur le plus recherché de la maison (cf. JEANTIN, t. 1, pp. 163-164).
Quant aux nuits passées sur le plancher des dortoirs et aux rondes nocturnes, elles pourraient paraître excessives. Mais durant l'année 1835-36, sous le vice-supériorat moins énergique et trop confiant du P. Chanel, une véritable entreprise de débauche organisée par un des professeurs mit longtemps avant d'être découverte. Ainsi se trouvaient en quelque sorte justifiées rétrospectivement les mesures exceptionnelles adoptées quelques années plus tôt par l'abbé Colin.
5. Pédagogie mariale.
L'insistance sur la lutte contre le mal portait par ailleurs la trace de l'époque, empreinte d'un moralisme rigoureux en regard duquel les aspects fondamentaux de la vie chrétienne - union au Christ, vie de la grâce, sacrements - semblaient parfois passer au second plan.
La pédagogie des Maristes, même en cefte période difficile, ne manquait pas cependant d'éléments positifs, dont le premier était naturellement la dévotion mariale. La solennité donnée à certaines cérémonies mariales, telle l'érection en 1833 d'une statue de la Vierge qui domine encore aujourd'hui la cour du collège, en est un premier signe (cf. doc. 707). Plus profonde était certainement l'action des congrégations mariales organisées parmi les élèves, telle celle des Serviteurs de Marie, à laquelle plus de la moitié des internes demanda à s'inscrire (cf. doc. 257), ou celles pour lesquelles M. Calin obtint à Rome en 1833 l'afflliation à la Prima primaria (cf. OM 1, p. 88).
Mais c'est au niveau de la direction spirituelle individuelle que cet esprit marial pouvait encore le mieux s'inculquer. Trois lettres de s. Pierre Chanel à un jeune élève du collège étudiant provisoirement à Lyon permettent de se rendre compte de la place que la Vierge tenait dans cette pédagogie religieuse (cf. Ecrits de s. Pierre Chanel, docc. 8-10 ).
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BILAN
A la rentrée de novembre 1836, le départ des missionnaires ayant appauvri en sujets la petite Société de Marie, Mgr Devie confia le collège au clergé du diocèse avec un vice-supérieur séculier. Il tint toutefois à conserver au P. Colin le titre de supérieur. Mais après deux ans la situation avait tellement empiré que l'évêque dut demander à la Société de Marie de reprendre la direction effective du collège, qu'elle gardera jusqu'en 1845. On ne pourrait espérer une meilleure preuve de la bonne réussite des Maristes au collège de 1829 à 1836 et du prestige personnel que le P. Colin s'était acquis dans le poste de supérieur, qu'il garda sans interruption de 1829 à 1845.
Certes les rapports entre aspirants à la Société de Marie et prêtres séculiers restèrent jusqu'au bout un point délicat, mais il faudrait, pour s'en étonner, n'avoir guère d'expérience des milieux ecclésiastiques. En définitive, malgré ces frictions, le bien s'était fait et ce petit séminaire d'un genre un peu spécial avait alimenté régulièrement le grand séminaire et fourni au diocèse de Belley une bonne partie de son recrutement.
Du point de vue de la Société de Marie, cette expérience de sept ans s'était avérée extrêmement profitable à un double titre. D'une part, le collège avait constitué le centre de ralliement, la communauté dans laquelle l'abbé Colin avait pu réunir les aspirants maristes de Belley et éprouver les vocations incertaines à un moment où la Société n'existait pas encore officiellement et n'avait pas de maison à elle. Par ailleurs, l'abbé Colin et ses confrères avaient pu acquérir là dans des circonstances difficiles une expérience pédagogique indispensable à une congrégation dont l'enseignement était un des buts principaux (cf. doc. 698, § 1). Cette pédagogie mariste sera bien mieux illustrée et attestée sous le généralat quand le P. Mayet pourra voir le P. Colin à l'oeuvre et noter ses conseils et instructions. On s'est borné ici aux rares traits relatifs à la période antérieure à 1836, qui n'est connue que d'une manière fragmentaire et ne saurait fournir un modèle complet de pédagogie. Il reste que c'est à cette époque difficile que se sont forgés les hommes et les principes qui permettront plus tard à la Société de Marie de donner sa note originale parmi les autres congrégations enseignantes.